De manière assez ironique, le documentaire pour ARTE Radio que nous avons enregistré début novembre a été publié il y a quelques jours. Au moment même où je prenais la décision de retourner vivre en Alsace.
Ça n’a pas été une décision facile. Ça ressemble même beaucoup à un constat d’échec. En réécoutant ce reportage et en repensant à l’enregistrement, je me dis que tout couvait déjà à l’époque, et ça s’entend.
Quand Andrada (la documentariste venue nous interroger) est repartie après une journée passée à nous enregistrer, Christophe s’est exclamé: « On a quand même été vachement négatifs… »
Vous avez sentis à travers notre dernier article que quelque chose clochait. Qu’il y avait quelque chose de pourri au royaume des Poly4. Effectivement.
Je n’arrive pas à vivre ici. Je végète. Pas d’amis, pas de boulot, être constamment dans le même lieu avec les trois même personnes sans possibilité de s’évader. J’ai fini par assimiler ça à une prison, et je suis devenu invivable. Rajoutez à ça que Charlotte et moi n’arrivons pas à accorder nos modes de vie (et ce n’est pas faute d’avoir essayé) et vous avez une cocotte minute qui lâche la pression tous les deux mois à grands coups d’engueulades, de remise en question et de larmes. On aura essayé de toutes nos forces mais ça n’a pas été suffisant. Et des fois il faut savoir dire « Stop ». S’arrêter là avant d’en venir à se détester. Et trouver d’autres solutions.
Puisque ce qui me manque est ma vie à Strasbourg, je retournerais à Strasbourg. Et comme j’aime toujours Charlotte et Julia notre relation ne se termine pas là. Elle change. Certains diront qu’elle régresse, je veux croire qu’elle évolue, même si ce n’est pas de la manière habituelle. Mais qui croit encore que je suis capable de faire les choses normalement ?
Un autre changement majeur se profile, puisque mon retour en Alsace signe la fin de la Poly-fidélité. Ce concept qui faisait de nous non pas des polyamoureux mais des bigames exclusifs, avec les mêmes écueils : Jalousie, possessivité, peur de l’abandon. Charlotte et moi allons donc nous ouvrir à la possibilité de faire de nouvelles rencontres amoureuses.
Il va me falloir réapprendre à vivre seul, à gérer différentes relations, dont deux à distance. Apprendre aussi à réagir face à la jalousie que ressentiront sûrement Julia et Charlotte en sachant qu’il y aura d’autre(s) femme(s) dans ma vie. Les accompagner pour qu’elles la surpassent. Ou encore expliquer le polyamour à celles avec qui je désirerai m’investir.
Et puis il y a la tristesse de les laisser. S’en sortiront-ils tous les trois ? Sauront-ils trouver un nouvel équilibre ? Je l’espère, même si ce ne sera pas chose facile.
Une page se tourne, c’est un nouveau chapitre, mais ce n’est pas la fin.
Images : Pisa – the Leaning Tower – Italy par Patrick Mayon
Les Ponts Couverts – Strasbourg par Vincent COURCELEAUD
Courage, bisous à vous 4.
Serais tu par hasard, amoureux des relations à distance ? ^^
ceci dit, bon courage pour la suite, j’imagine que chacun doit se poser plein de questions, et se sont des moments pas forcément évidents.
En fait, vous êtes un couple « normal ».
Avec les mêmes évolutions, les mêmes questionnements, les mêmes envies et remises en questions.
Je salue tout de même ta décision de retourner en Alsace.
Tu penses à toi, et malgré ce que l’on peut croire, faire preuve « d’égoïsme » n’est pas si simple.
Vers la fin du reportage est évoqué un « caractère plus conflictuel »… Et en effet, il me semblait voir, d’ici, deux groupes de personnalités : les jaloux/vexables et les sociables/insouciants, les nerveux/inquiets et les calmes/pépères (Christophe/Julia et Charlotte/Nicolas). Je pensais que le problème (s’il devait y avoir) serait venu de là…
Et pourtant ce ne sont pas les passions exacerbées qui vous ont séparés, mais d’autres choses relevant du quotidien, des différences d’habitudes et de l’ennui, de la capacité de chacun à réussir à vivre entre eux, en groupe restreint, ou au contraire en groupes élargis. S’il y avait eu ça en commun (envie de vivre en autarcie), les caractères se seraient peut-être assemblés avec plus d’harmonie.
C’est surprenant, pour moi. Je pensais que le polyamour nécessitait énormément d’empathie, à toujours vouloir que les autres soient heureux, et surtout pas de jalousie. Et c’est le moins jaloux de tous (au départ), celui qui acceptait tout type de situation sans s’inquiéter, qui s’écarte.
Quoiqu’il en soit, je vous souhaite à tous de profiter pleinement des nouveaux chemins qui s’annoncent.
Leolu : Le moins jaloux est le moins attaché (je dis bien attaché, pas amoureux). Moins on a de lien(s), plus on peut (et j’insiste sur « peut ») s’éloigner ou se rapprocher à sa guise.
Mon expérience personnelle concerne le fonctionnement en triade. J’ai vécu plusieurs triades et celle que je vis actuellement avec mes deux amoureux dure depuis deux ans. Mais il s’agit d’une triade non exclusive dans le sens ou chacun peut et a ou a déjà eu des histoires en parallèles, sur le côté.
En lisant ce post, j’ai plein de questions qui me viennent :
Nicolas, tu repars seul, donc Julia reste.
Charlotte, Nicolas part mais Julia reste.
Comment le vivez-vous, chacun ? Sont-ce des décisions communes ou unilatérales ?
Charlotte et Nicolas, vous faites le choix de vous ouvrir à d’autres relations (et donc effectivement à mon sens de vous ouvrir pour la première fois au polyamour). Julia et Christophe ne font pas ce choix, semble-t-il. Pourquoi ?
J’ai écouté votre témoignage radio est c’est vrai que c’est ce qui est difficile à vivre qui ressort beaucoup : peur, jalousie. Et j’ai envie de vous dire : rien qui ne soit dépassable, vous n’êtes pas bloqués et réduits à ces schémas là à vie. J’ai été une jalouse maladive pendant des années. En 2008, ça a basculé, et j’ai basculé en même temps vers une nouvelle manière d’être en relation : libre et non exclusive. Aujourd’hui, je ressens parfois la jalousie, mais beaucoup plus soft et très supportable par rapport à ce que j’ai connu. Cette jalousie parle de moi et pointe chez moi ce que je peux dépasser, m’indique ce à quoi je suis encore identifiée : celle qui a besoin de reconnaissance, celle qui a peur de ne pas être choisie, celle qui a peur d’être abandonnée. Toutes ces moi ont leur source dans mon passé et je peux les transcender. En général, les gens me regardent bizarre quand je dis ça, alors que ce que je dis à mon sens est super positif, je dis juste que nous ne sommes pas prisonniers de nos peurs et pas condamnés à vivre ces émotions violentes toute la vie.
Nicolas, je trouve que ta décision de partir est une décision intéressante et j’ai l’impression que son fondement est libre : tu fais un choix difficile que quelqu’un qui baserait ses décisions sur la peur ne ferait pas.
Je pose plein de questions, je dois paraître invasive… Je suis votre histoire depuis des mois et je la suis avec beaucoup d’intérêt. Je ne connais personne dans mon entourage proche ou lointain qui vive cette expérience : la vie ensemble à quatre dans le cadre de relations alternatives à la norme. Mon « rêve » étant pour moi même de vivre avec mes deux amoureux et d’avoir des enfants des deux indifféremment (ce qui n’est pas partagé par eux deux et je ne vis qu’avec un seul, donc ça n’arrivera pas à priori), votre expérience m’interpelle forcément. Je l’admire. Je suis attentive à ses évolutions (je ne vois aucune régression là-dedans).
Bref… Je pense à vous et je vous souhaite tout le bon sens et la clarté possibles, l’amour de vous et des autres aussi, pour continuer à vivre cette expérience.
Je sais même pas par où commencer pour te répondre 😀
« Sont-ce des décisions communes ou unilatérales ? » C’est une décision que j’ai prise et quand j’en ai discuté avec Charlotte elle était arrivée à la même conclusion.
« tu fais un choix difficile que quelqu’un qui baserait ses décisions sur la peur ne ferait pas. » J’ai du mal à saisir de quelle peur il pourrait s’agir. La peur que ça ne marche pas à distance ? Si c’est ça, elle est à opposer avec la certitude qu’en restant ça ne marche pas mieux. Le choix semble plus simple avec ça en tête: Stagner en étant malheureux ou avoir une chance de redevenir heureux.
Le point de vue de Charlotte arrive dans quelques jours. 🙂
Je pensais plutôt à la peur de perdre définitivement l’une, l’autre ou les deux. Tu es arrivé avec Julia, mais tu repars sans elle. Mais tu repars quand même, tu ne restes pas par peur de la laisser ou de la perdre, tu innoves. J’admire.
« …Certains diront qu’elle régresse… »
Ce sont vos vies de couple, vous les construisez comme bon vous semble, vous pouvez leur donner autant de forme que vous souhaitez (Comme l’introduction de la « poly-fidélité », je n’avais pas cette notion chez les polyamoureux, disons, que les seuls couples que je connaisse sont simplement polyamoureux.)ça ne tient qu’à vos désirs. 😉
(Même si j’avais pensé quelques secondes, que le déménagement n’était pas une si chouette idée, j’ai une petite pointe de déception, c’était assez beau de penser qu’aussi jeunes vous pouviez faire d’autres choix de vie et les voir durer dans le temps.)
Je suis curieuse de lire les réponses aux questions de Leolu.
Prenez soin de vous.
Comme d’autres, je lis vos témoignages depuis le début, et comme il n’y en avait pas de nouveaux depuis plusieurs mois, je ne suis guère surprise de ce qui se passe, à savoir un départ… Un peu surprise tout de même que Nicolas parte seul (ou qu’il soit le seul à partir, au choix).
La notion de poly-fidélité m’avait paru évidente dans vos propos, et c’est quelque chose qui au fond ne pouvait qu’attiser la jalousie, donc ça peut être une bonne chose d’y mettre fin. Le temps vous le dira, comme pour tout le reste d’ailleurs.
En tout cas, je vous souhaite à tous bon courage et bonne chance, et je dis chapeau à Nicolas pour cette décision vraiment pas évidente.
Du coup, une question bête par rapport à ce départ : allez-vous quand même continuer ces témoignages, ou est-ce la fin de l’aventure Poly4mour.fr ?